La
page
blanche

La revue n° 43 illustrations

illustrations

Chroniques érotiques quotidiennes et autres

Après « Propos lourds sur tissus légers», essai graphique critique sur l’image d’information et revue de presse acide, mon regard se porte aujourd’hui sur l’image du corps dans les médias, la toile, la photographie, le cinéma et la publicité. Le principe ici se fonde comme dans la série précédente sur une intention récurrente: composer des peintures sur l’image en fin de cycle, à la manière des nouveaux réalistes qui utilisaient l’objet. Ici c’est l’image (en)registrée et livrée au public de façon brute-brutale qui me sert de matériau et sous-tend mon propos. Dans cette série plutôt légère, pas de «commentaire» puisqu’il ne s’agit plus de critiquer l’information et la façon dont elle nous est servie - froide, linéaire, voyeuse- mais plutôt d’émettre à chaque tableau une pensée écrite et peinte qui fait référence et nous plonge dans notre espace socioculturel. Le Commentaire en bas de toile (page) ou sur le côté serait cette pensée personnelle pétrie et fabriquée par tout ce que j’ai vu, rencontré vécu et que je pense en silence, alchimie littéraire intime qui s’épanouit en regardant une personne, un personnage à l’écran, en photo ou dans une publicité. Cette pensée peut être triviale, humoristique, grinçante, elle peut aussi se superposer effacer ou remplacer les dialogues proposés dans une série ou un film en bas d’écran : bande défilante d’infos diverses, s m s de téléspectateurs... Plus encore, le choix d’un traitement quasi monochrome (peintures en noir et blanc) se fonde sur l’écriture. La série tient du roman, du synopsis. On peut penser à des couvertures de livres où le nom de l’auteur serait omis. En effet j’emprunte et interprète des images à des auteurs, moi compris, telle une citation , et leur fais raconter une histoire. Une (histoire) nouvelle, un (nouveau) roman. Ainsi chaque image du corps filmé, photographié, «publicifié», pourrait être traduite à notre guise et notre imaginaire serait libéré d’un «prêt à penser» omniprésent dans le regard que nous portons sur l’autre. Le subliminal enfin développé par chacun et non pas sournoisement glissé dans la pub ou l’info.
Tel est mon dessin ici et tant mieux si l’on trouve que l’érotisme préside à cette série. Ma proposition est bien entendu légère et n’a d’autre vertu que de vous distraire, vous amuser en ces temps bien rudes pour la fantaisie. J’insiste, inventons une nouvelle façon de nous voir, de nous estimer, de nous désirer. Désirer l’autre n’est pas en abuser ou le réduire à une portion incongrue du corps. Voilà le sens de ces chroniques.


Francis Oudin, Novembre 2009