La
page
blanche

La revue n° 47 poètes de service

poètes de service

Pierre Scanzano

Car pour tout vous dire, je n’ai jamais publié, étant trop pris à me vivre...ce serait trop long pour vous en expliquer les raisons.

Maintenant je passe mon temps à essayer d’établir ce que j’aurais dû écrire depuis longtemps.

Je pense qu’il faut avoir quelque chose à dire, l’ayant vécue, pour assembler ne serait ce que des bribes ou des restes...

 

 

 

 

(Extrait du recueil « Entre-Deux »)

 

 

 

s’il en est

 

il y a les strates

 

les différents niveaux

 

les couches sédimentaires

 

qui composent

 

et décomposent

 

ma structure.

 

s’il en est

 

J’entasse.

 

 

****

 

 

le vide

cet objet

 

s’emmêle

au néant

 

ensemble

s’annulent

 

le vide

cet objet

 

distribue

ce qui en fait

 

m’appartient

 

 

****

  

 

je ne suis attaché à rien

dans l’air

 

je suis libre

de pulvériser qui je veux

 

le vent est

ma recherche

du sang

 

 

****

 

 

entre-deux

je suis

entre-deux

 

comme une feuille d’automne

qui voltige

ni dans l’air

ni à ras de terre

 

entre-deux

je cogne l’espace

intrinsèque

 

ni gauche ni droite

nulle part

dans l’isolement

de la substance

inversée

 

celle qui nie

l’autre

et la crée

dans l’éloignement

de l’instant

 

entre-deux

proportions

du vide

de

matière

à

vivre

 

 

Pierre Scanzano

 

 

 

 

 

 

 

(Extrait du recueil « Reliques lyriques »)

 

 

 

tout est arbre dans ses racines d’arbre

tout devient un jour ou l’autre arbre

arbre sans feuilles sans fruits d’arbre

arbre sans bras écorce à nu mais arbre

 

toujours arbre d’avenue ou forêt d’arbres

arbre indissociable des autres arbres

arbre méconnu arbre blessé dans le cœur d’arbre

par la foudre du temps se croyant arbre intemporel

 

arbre aux cheveux roux une nuit d’été arborescente

agrippé à la falaise de l’amour regorgeant sa genèse

arbre d’automne arbre détestable mais arbre

arbre comi-tragique heureusement arbre

 

heureux d’hisser sa cuirasse arboricole

la sève humaine au cieux des hommes

le monde devrait se vêtir en peau d’arbre

se chauffer en lui ne manger que arbre

 

ne rêver que arbre

ne mourir que arbre

se dévêtir en arbre

naître arbre à jamais à jamais arbre...

 

 

Pierre Scanzano

 

 

 

 

 

 

 

(Extrait du recueil S.A.V  2012/2013)  

 

 

 

Courbe 

 

Ce qui se tord à nouveau tôt ou tard se retordra    

retardé ou retraçant précisément l’avancée sans 

bruit comme émaillé d’un fond sans fond avec 

toute la spécificité d’un puits long sourd entre 

espacé de sombre d’humidité et de froid carcéral 

ainsi que phrases et pièges d’inclinaisons cassées 

soyons sûrs neutres entiers restons calmes calfeutrés 

imbibés d’air la comprimant  dans ce cas soupeser 

ne suffit plus  qui soupeser après qui d’autre élargir 

l’anse le pour le contre s’inversent la poids gêne

contre tacle acceptons-nous tels quels uniques oui 

à réitérer oui à ceci ou cela avant que toute chose 

ne soit de plus en plus consternante encore à suivre 

le suivant encore au corps sans répondant encore

ce fade insinué épaississant quand et comment faire

un moi mort  un soi mort  que mort réel mort dans

sa chair décoffrée soudain mourant pour de vrai

surtout ignoble blessé sans mourir là à tambouriner  

porte à porte comme un frappadingue du matin au  

matin enfin croix et délice à crépir régulièrement

pignon et façade du sang en talocher soigneusement

la surface deux couches rases en fines lamelles 

strates de soie  de soi à soi  remettre d’à plomb l’os

le redresser l’écumer mis sur patte remarcher donc

dans l’immortel ou l’incliné baleine d’ombres usuelles 

cela dépend de qui et en quoi consiste ce qui existe

sous l’ombrelle du cas par cas au cas où quelque chose...

en tout cas va et vient de circonstances va et vient à 

l’amorce d’heures creuses et fixes  en quoi le fixer

en qui seront fixées creuses et fixes d’heure en heure

ah mon caroubier d’enfance sous-toi fruit mûr délayée

relayée au compteur de mars à mars date sous-datée 

qui sait jusqu’où ira-t-on piocher un souvenir potable

qui tienne l’arbalète sa voix assez pour tenir quelque

chose intenable  on ne sait plus compter sans effacer 

quelqu’un dans le noeud coulant du temps  jours en 

hardes les jours viennent à l’abrasion d’être à en venir 

sans approcher la venue que l’on verrait possible c’est

possible ! On passe au crible le reliquat de ceux qui

déroulent un minima d’espace avant d’en venir aux mains 

de l’espèce là au bord s’engouffrant par inadvertance 

à la queue leu leu dans le goulet et de mémoires en 

mémoires diluant asséchant sécrétant dans l’atroce vide 

nécrophage l’Absent tumultueux  Absent

 

 

Pierre Scanzano