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blanche

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PLACE AUX POÈMES

LIVRE ZOOM

ZOOM MAULPOIX

zoom sur jean-michel maulpoix 



jean-michel maulpoix est un poète qui écrit avec des pauses, des reprises, des souffles . il n’a pas le lyrisme de rimbaud, mais quelque chose de plus discret et de plus tenace : une attention aux vibrations, aux échos lointains, aux ombres portées. des échos de syllabes semblent résonner longtemps après avoir été prononcées. il parle de la lumière à travers la vitre, des visages en train de s’effacer, des livres qui s’ouvrent et se ferment. sa poésie est une méditation sur l’éphémère, avec une sorte de sérénité lucide, comme si le monde était habitable dans ses fissures.

il a enseigné la littérature, traduit des poètes anglais (comme stevens), et écrit des essais sur la poésie comme art de la présence. ses propres poèmes sont des lieux où le temps se suspend, où les objets du quotidien (une tasse, une fenêtre, un chemin) deviennent les dépositaires d’une mémoire qui appartient à tous. on dirait qu’il écrit pour capter ce moment où le réalité bascule dans la rêverie, où le familier se charge soudain d’une étrange électricité. ses écrits sont des instantanés au bord du visible, là où les choses commencent à peine. la lumière tombe sur la table de biais, un livre est ouvert, des pages ne tiennent pas en place. quelqu’un a écrit là, en marge, des mots que le temps n’a pas encore effacés.



je lis, ou plutôt je devine, comme on écoute une voix lointaine qui chuchote à travers les murs. le matin est une page blanche où s’inscrivent lentement les ombres. tu te lèves, tu bois un café, tu regardes par la fenêtre : le monde est là, immobile et changeant, comme un paysage qu’on ne finit pas de reconnaître.les visages que nous avons aimés s’effacent un à un, comme des dessins à la craie sur un tableau noir.


il reste des traces, bien sûr : une intonation, un geste, le souvenir d’un rire, mais c’est à peine si nous les distinguons dans le brouillard des années. je marche dans la ville, et la ville me traverse. les rues sont des phrases inachevées, les passants, des mots oubliés.


parfois, un visage me frôle, une voix m’appelle, mais quand je me retourne, il n’y a plus personne.nous parlons, nous parlons, et les mots s’envolent comme des oiseaux blessés.


ils retombent plus loin, sur d’autres lèvres, dans d’autres silences.

ce qui reste de nous, ce sont ces syllabes égarées, ces bribes de phrases que le vent emporte.