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AUTEUR-E-S - Index I

82 - Pierre Lamarque

PROPOSITION

PROPOSITION, POSITION, ACTION, EXEMPLES










PROPOSITION 



Nous proposons aux personnes invitées de publier dans leurs pages personnelles une page pour chacun de leurs livres publiés ou à paraître, permettant de découvrir le livre - on peut sélectionner un ou des passages. Le mieux est de photographier une ou des pages.



POSITION



Assurer une visibilité. Offrir un fond.




ACTION


Merci d'écrire à contact@lapageblanche.com pour nous signaler vos participations.



EXEMPLE 1

Endiablade - Michail Bougakov

Françoise Flamant (Traducteur)

112 pages

Gallimard (07/12/2023)






EXEMPLE 2:


LE CLEZIO Jean-Marie Gustave - L’inconnu sur la terre - essai - Ed. Gallimard



Extrait 


On voit ce qu'il y a à l'intérieur des arbres. On ne le voit pas vraiment avec les yeux, mais on le sent. C'est là, devant moi, comme une armature raidie à l'intérieur du tronc. Les arbres sont immobiles, bien calmes, dans le vent, dans la lumière. Oui, ils sont ainsi. Et pourtant, on sent les flammes dures et brillantes qui sont debout à l'intérieur de leur tronc. Jamais on n'a senti à ce point la force cruelle et obstinée de l'existence. Les arbres sont droits et solides. Partout, sur la terre sèche, brûlent les flammes solitaires. Elles sont dressées, debout, pareilles à des hommes, pareilles à des statues, et ces flammes brûlent, à la fois chaudes et froides, denses, faisceaux de lumière concentrée. Autour d'elles, l'espace nu, vide, silencieux. Toute la vie organique est dans ces flammes qui brûlent sans vaciller.


On est devant les arbres, et on ne voit que ces flammes, de tout son corps. Jamais les yeux ne les verront, car elles sont cachées par l’écorce des troncs, par la terre compacte, par les feuillages. Branches enflammées, racines enflammées. Les petites feuilles qui pivotent dans le vent et jettent des étincelles. Le vert du feuillage est une large flamme gazeuse, l'ombre noire est une tache calcinée. Les arbres sont si proches du feu que, parfois, du ciel vient la charge électrique électrique qui d'un seul coup les allume. Arbres de foudre, arbres d'incendie !


Qu'est-ce qu'on est soi-même avec sa petite vie d'animal, devant tant de force ? On sent partout ces flammes verticales debout sur la terre, on avance au milieu d'une forêt de flammes. Je ne voudrais jamais cesser de sentir cela, la dureté, la volonté, l'exigence des arbres. Pour cela, tout le temps, je vais vers les arbres, sans m'approcher trop. Je ne veux pas être en eux. Je ne veux pas leur parler. Je veux seulement sentir le rayonnement, entendre le bruit de la force, sentir grandir en moi la lumière de toutes ces flammes verticales. Il n'y a pas de plus grande ivresse que cette vie, debout sur la terre, cette vie continue. Les arbres ne bougent pas, ne parlent pas. Ils sont solitaires comme les montagnes, et leur paix s'étend sur toute la surface de la terre. Mais ils brûlent, et leurs flammes dures répondent aux flammes du soleil. Leurs flammes sont les flamme de la terre, nourries d'eau, de vent et de lumière.


Le bleu du ciel insistant, inamovible – lumière, tendue – et l'apaisement, quand viennent les premiers nuages.




Pierre Lamarque, Sandrine Cerruti