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INDEX DES AUTEUR-E-S

49 - Arnaud Rivière Kéraval

Poèmes

ISTANBUL ARTAUD


 


Point de départ le harem et le palais    voraces du temps de l'autre empire    où coupoles et arches se livrent à coup de bacchanales mosaïques    Maintenant c’est la foule des visages du grand bazar    d'humeur à m'étourdir les signes     qu’agrippent tentures et épices    M'extirper        descendre la rue tout droit jusqu'à la Corne d'Or    enjamber les poissons du Bosphore répondant par vagues à mon élan    comme les mouettes au muezzin dans les hauteurs des minarets    De là remonter le sillon foisonnant vers Taksim    je retrouve la foule pusillanime qui m’affole    avant d’englober son tourbillon    urgence de l’esquive par la contre-allée    Passer la porte d'une échoppe    refuge de verre entre étoffes italiennes    avec en offrande    la main noire dans les oreilles qui apaise mes remparts    Les frontières se diluent à l’abri du hasard    quand Altuğ inattendu me parle d'Antonin Artaud    ses mains, son sourire, sa voix croquent mes atermoiements    Altuğ le magnifique    rhapsode byzantin sur le chemin des mots que j’écouterai des heures.

 

 

 

 

LA NUIT

 

les bougies éclairent les oripeaux de la sphère le stupre exalte les parfums délétères c’est la nuit grande nuit où s’offrent les corps les arbres maudits où s’écrasent les joncs du paraître c’est la nuit longue nuit que blasphèment les vents et les êtres longtemps j’attends leur départ vibre l’ivraie aspire les espoirs au loin encore les gyrophares et puis plus rien enfin elle m’appartient

 

le rythme du sang tamponne mes tempes l’hiver est fini dévorant les clampes sur l’albâtre et le nu tendu sous la lune vaste étincelle l’évidence se déploie et défie l’ingénu j’inscris des traits des obliques dans une langue intemporelle que le futur sertira héroïque à moi le choix des ombres et des reflets à moi l’exclusive relique 



DÉPART


 Espace fugue les délaissés de la terre

dans le froid les flaques de la cité 

aux frontières verticales

paradent sous le rose des pavés 

là où les feuilles le désert 

par-delà les vitres 

cultivent la déveine

force l’envie brutalise les départs

avec en bandoulière 

le sacrifice de l’ankylose 

remettre à demain le passé

Au loin au loin d’autres frontières 

se dévoilent comme l’orage au  premier bas-fond 

mais nous les occultons 

portant l’orgueil des ventres sourds

nous partirons quand même 

allègre imaginaire 

enfreindre leur désespoir