Le dépôt
Séquences 2 - Bruno Giffard
Quelques hommes détachent leurs mots qui s’enroulent avec les bouffées de cigarette sur une courte distance avant de succomber à l’infini – éclosion du seuil.
Le serment rose du talon des femmes sarcle une certitude finie d’asphalte.
Jours pareils à du bois mort jeté dans la gueule du poêle
La bouche dégage ses rêves
jets filandreux sur la page
Je lance
l’étoffe noire
des mots
rien qu’une présence
qui n’ose partir
de peur que le reste
s’écroule :
les poutres
avec le dialogue
notre bouche médite
ce goût d’impuissance
sur des tronçons
de parole
un appel à l’aide
signerait
le départ du souffle
Tu te mêles à l’encre courante
par irréfragable espoir
de courir enfin
la veine du paysage
tes seins
prennent des airs de fleurs
dans le désert
sur un fil idyllique
de cerf-volant
mon immensité claque
à la dérive de toi
mémoire affabulée
je me rafistole
Je m’accoude
l’horizon fixe aujourd’hui
juste au bord du vide
mes pensées
Compter les étoiles
endormir la mort
Le miroir regarde
mon inquiétude au teint impersonnel
Souvent au milieu d’un terrain vague
debout, l’air de rien
cherchant à toucher au ciel
la forme du nuage
J’apprends encore à lire le recul, alors que s’arme mon hurlement.
Défense hystérique de peindre le paysage des doigts,
par la pulpe s’y enfoncer.
Magnifique désolation – cette grisaille larmoyante d’automne. La subsistance du vert tourne au brouillard. Des variations crépusculaires s’inoculent sous une plaque d’espace. Les branches nagent à travers charges d’air, et leurs feuillages frissonnent jusque derrière ton front.
La tête repose dans une maladie qui rend invisible le lit des idées. Une ville enserre avec un savoir psychiatrique l’horizon au fond duquel elle se dépose. Constante patience de mire précipitée.
Reste aux yeux à divaguer une mer d’espace – avec des fleurs lumineuses qui passent devant un amphithéâtre de cendres figées. Ouvertures en variations grimaçantes.
Au bord du monde la silhouette des songes tremble, à faire le guet – un carré de trottoir tient lieu d’île. Noués au ventre par des départements de froideur, mes poings dans leur quiétude colérique tracent un embryon de prière. Je pense alors à tes lèvres – ailes sur les degrés thoraciques.
Tes yeux par le détail me déraillent le cœur.
Mais à ton visage, l’immunité du rayonnement.
La qualité douloureuse du plaisir m’arrête devant des valeurs d’avant le fer. Alors que ma foudre fouille tes lamentations, touche par les entrailles au nid électrique des assises rocheuses.