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Avant le grand voyage Alain Rivière
il vit avec des paons dans un petit appartement, il les laisse sortir le matin devant la porte, il les accompagne un peu au-dehors, souvent la journée s'arrête là.
À propos
Extraits
si au moins il s'agissait d'un cauchemar, se dit-il en
voyant dans un bus tous les voyageurs la tête penchée
sur un petit écran, si au moins il pouvait leur parler
il se méfie de ce qu'il voit, même les femmes nues
alignées qu'il aperçoit une nuit d'hiver par la porte
entrouverte d'un magasin dans une avenue déserte
comme le jardinier de Rumi il a déjà donné toutes
les roses du parc à un voleur, il lui donnerait volontiers
aussi la maison, les paons, les amis, les femmes
il ne croit pas aux secrets, aux mondes cachés,
quelle foutaise, s'emporte-t-il devant une femme
voilée dans la rue, tout est clair comme de l'eau de
roche
5 questions à Alain Rivière à propos de son livre “Avant le grand voyage” par Philippe Sergent
Après “Les chiens nus” (Conspiration, 2023) et “Dolores” (Paulette-éditrice, 2024), Alain Rivière signe un nouveau livre très original par sa facture. Nous lui avons posé quelques questions pour en savoir plus.
Philippe Sergent : Votre livre “Avant le grand voyage” surprend autant par sa forme que par son contenu. Quelle était votre intention au départ?
Alain Rivière : Ce livre est, je crois, un seul long poème fait de moments pour évoquer la vieillesse, les jours avant le grand voyage. Il s'agit ici de la vie d'un homme qui à la fois se pose des questions et ne prend pas toute cette fin au sérieux. Mon souhait est d'évoquer ce temps sur un mode ludique, avec humour et aussi avec des points de repères qui renvoient à la philosophie.
Philippe Sergent : Dès les premières pages le lecteur est confronté à une destinée particulière avec des événements inattendus pour un vieil homme. Qui est ce personnage?
Alain Rivière : La rencontre entre poésie et philosophie m'intéresse beaucoup. La vieillesse semble pour beaucoup le moment de réfléchir à la vie, à celle qu'on a menée, à celle des autres, et puis à l'inconnu qu'on appelle la mort. Pour autant, il y a beaucoup de clichés concernant la vieillesse comme d'ailleurs les autres époques de la vie. Le personnage de mon livre échappe peut-être à ce monde de contrôles, il appréhende le réel sans trop y croire ce qui ne l'empêche pas d'être encore amoureux et de prendre plaisir à ses derniers jours.
Philippe Sergent : La narration dans ce poème est à la troisième personne et pourtant on ressent une grande proximité avec ce personnage. Pourquoi ce choix?
Alain Rivière : Nous sommes dans le monde du je. Je suis un peu fatigué de cette rhétorique. Le il peut aussi être fructueux et apporter toute une dimension dans l'écriture poétique. En fait, c'est un vaste sujet. Pour ma part, je ne souhaitais pas me mettre dans la peau de ce personnage, mais plutôt de le laisser évoluer à sa guise. Et, de plus, je n'ai pas encore son âge!
Philippe Sergent : Le livre est fait d'une succession de paragraphes qui apparament n'ont pas de liens entre eux. S'agit-il de notations?
Alain Rivière : De notations? Je ne pense pas. Il s'agit de moments séparés, il est vrai, mais mon intention est de rendre compte de l'aspect souvent morcelé de la vie quotidienne. On se comporte et on perçoit le réel différement suivant les situations, suivant les gens que nous avons en face de nous. Cela peut changer très vite. C'est aussi un des sujets du livre.
Philippe Sergent : On va au fil des paragraphes de surprise en surprise, est-ce pour vous un choix de vouloir étonner lecteur?
Alain Rivière : Je ne sais pas au juste et je peux difficilement parler des effets possibles de ce livre. Si, comme l'a écrit Aristote, la philosophie est d'abord étonnement, la poésie provient aussi de l'insoupçonné. L'inconnu est autant pour le lecteur que pour l’écrivain.