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blanche

La revue n° 40 Constantin Pricop / Simple poème

Constantin Pricop / Simple poème

LE PAS DU LOUP / 2001

(LES AUREOLES)

les auréoles
sur le point d’exploser

les têtes
devenues trop larges

la lumière les nimbes
mon Dieux, si profonds

sur les sentiers coulent
les mélancolies
de ce paisible village

des ombres furtives
toutes des âmes clandestines

feuilles épargnées
par le vent

les corbeaux fuient
la steppe trop large

il faut qu’on parte
de bonne heure

 

 




C’EST COMME SI

la violence monte
le temps glisse sous la peau
les eaux sont rouges

c’est comme
si le monde
finissait

un simple balbutiement
la confusion des sens

(la confusion des sens
et les mondes
s’écroulent)

la grammaire c’est la femme commune
qui veut nous tenir tous dans ses draps

je campe sur le champ poussiéreux
j’aime les chardons

et c’est comme si le monde finissait

 

 



LE FLEUVE À UNE SEULE RIVIÈRE

elle fait l’amour
comme un fleuve à une seule rivière

la pureté du sombre
on peut le dire

les quelques étoiles débiles
dans la paume du mendiant

(le poète ne sait pas exprimer le vide
qu’il remplisse sa peur avec le verglas des images)

cet après-midi devient bouteille
pleine de tourbillons d’air glacé

je cherche le lit du fleuve

le fleuve...
mono-rivière

 

 

 



LE SEXE DE LA NUIT

exciter
le sexe
de la nuit

le prisonnier dans son hamac de soie
balance (entre quoi et quoi?)

la lourdeur fait le noir si doux

belle explosion
fleur blanche

le vide est boiteux
il traverse la vie
et fait du bruit
avec ses béquilles

(de la musique avant toute chose)

et je taille dans le noir
avec des dents excitées
des dès tout noirs

 

 

 

 

 

LE MONDE À L’ENVERS

plus que jamais
le monde
à l’envers

(le bien devenu le mal le laid le beau le mur devenu fenêtre l’oiseau la taupe la petite barque le transatlantique grand comme l’océan les amants devenus des ennemis jurés les oreilles les yeux - mais passons, tout devient trop banal - le rien devient plus que rien la vie devient la mort. etc.)

le monde
à l’envers

des chiffres
simplement

 

 

 



DES PHOTOS

j’ai mis les mains
sur la table
j’attends qu’elles parlent

les photos ne parlent pas

freud nous a livré
l’être (humain – plus ou moins)
sous forme de bande roulante

il a défalqué de la sensualité
des bribes si petites
pour émietter le plaisir

le mouvement et le repos
se côtoient toujours

 

 

 



(CHIEN VIOLET)

chien violet
aujourd’hui

comme toit
son aboiement

qui sait?
qui est arrivé?

l’odeur
de rien

ils sont rongés
les yeux rouges

des fragments de lune
dans le noir

scintillement des canines

son regard est si fixe
je me sens fixé

dans l’aiguille
gregor samsa

s’il parle vraiment
c’est sans doute moi
qui comprends
ses fautes
sans parole

vendredi, 12 avril, 2002 (si 11 aprilie)
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