La
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blanche

La revue n° 67 simple poème

simple poème

Le silence recouvre la terre, nul son, pas même un cri, tout dort

Bouger, ne pas bouger ne pas bouger se dire bougeant

Soudain un tout petit cri fait frissonner le silence

La terre se fendille à son écoute craquelures en forme d’étoile

Le cri parcourt le monde il zigzague sur l’écorce terrestre

Creuse des sillons interstellaires

Immobile le corps est dans le sépulcre des ans

Immobile le corps est là où tout n’est que tumulte

Jaillissement et tempête en attente en tension il prête attention au silence de l’aube

Le tout petit cri s’appuie sur les ailes du vent

Kangourou ailé il saute de lune en lune

Vole de terre en terre éveille un à un les astres engourdis de silence

Visite les trous noirs silence mystère douleurs

Bouger s’autoriser à bouger puis crier rayer le silence d’un cri

Le tout petit cri rebondit

Il frôle le soleil avec la langueur d’un serpent de mer

Il crie dans l’ombre de l’aveuglante lumière

Recule grandit s’enfle se propage en ondes successives devient énorme, déchire le ciel

Ouvrir une béance et regarder la béance se voir dans la béance ne pas la refermer tout de

suite

Y laisser s’installer l’oeil il capte l’étendue du vide provoqué par le si petit mouvement

Le petit cri monte du ventre endormi grondement sourd de la terre venu un instant habiter

le corps

Son intégré son haché son mâché

Laisser raisonner le cri jusqu’à ce qu’il se brise et refermer.

Ne pas bouger être immobile arc-bouter sur l’espace refermé

Petit cri cherche petit corps son cherche organe pour vie commune

Ohé remue toi le corps entend il tressaille la tête pivote légèrement

Mais non

Espoir… en suspend

Poumons droit poumon gauche petits astres bordés de voyelles drapés de consonnes

Attendant que le diaphragme veuille bien leur laisser la place de s’épanouir

Fleurs aux cœur noir s’ouvrant se fermant au gré du souffle au gré du temps

Déchirure de nuit très lentement elle se replace comme avant

Le corps s’endort

À peine le son se fait-il entendre que le monde se tait

En attente

Silence son silence son silence son silence son silence son silence le rythme s’accélère

Extension rétraction Extension rétraction

Puis très vite ça s’ouvre, ça nait.

Corinne Tisserand-Simon