La
page
blanche

La revue n° 64 e-poésies

e-poésies

CONSTAT À L’AMIABLE

Je frôle la correctionnelle

la danse de rappel

j’ai l’âge de m’envoyer en l’air

de me faire la fête

de me tenir tête

 

Aujourd’hui

je mène une vie de brouette

avec une roue devant

moi qui n’ai jamais porté d’enfant

sec comme un poulet

vide comme une bassine

 

Avec mes yeux brouillés

mes doigts rouillés

j’écris des mots d’argent

des mots que j’attrape à la volée

face au vent

je les empile jour après jour

comme des carnets d’amour

 

Le soir je dors au fond du jardin

j’enchaîne les rêves

j’imagine demain

ma vie d’après comme un avant

je me rappelle l’épaisseur des gens

le frottement des visages

l’odeur de leur regard

les retrouvailles

 

Et le matin tout me revient

chaque jour un peu moins

tout ça est déjà loin

Luc Marsal
Poème extrait de Les neiges éternelles, éditions « L’échappée belle », 2024