La
page
blanche

La revue n° 66 simple poème

simple poème

il faut apprendre
à laisser filer tout bas
le cours des rêveries 

 désir planté dans la chair
pour cette fille sortie d’une boîte à musique
qui passe dans sa robe de ballerine
sur un fil somnambulique
loin au-dessus du casse-tête des dépotoirs

 la lune se change
paupière suave
et rase

 Tendrement
je jouis en silence
des regards qui m’ enferment
sous un lit de fleurs

 un bruit d’os
ricanement en puissance
dans l’œuf du désir

mon oreiller comporte des brèches

que je colmate
en saignant l’horizon du désir

Une voisine met les tripes percées d’un chat
sur la corde
elles qui hurlent encore
se communiquent au couchant
plus loin une blonde lève son pouce cru

excite l’autoroute

qui se perd en ligne fantôme

 du béton armé s’extraient les graffitis
du jour à la nuit se verse
une révolution fantôme

 signal d’une corde raide le sexe s’en va en boîtant
son museau rôde sur la graine des trottoirs

 En plein été me creusent
les gorgées de bière

 aux pintes grimpantes
un choc tient nos regards

 sur la terrasse une fièvre
lâche son rictus de forges

 cœur lavé par révolutions
jusqu’à crudité d’esprit

 l’intérieur du cristal se hume
gravures d’écorce aux sens

 ma tête se renverse
dans la perpétration du bleu  

la personne qui m’épaule

devient prochain souvenir

  doigts fondus dans l’ ivresse

jupes qu’échappe l’espoir

  mort dont la fuite ralentit  

instants d’averse dénouée

 un vent se pose entre nous
familier d’anciens déserts

 penchée au plus secret
roule la voix des soupirs

 vapeurs du chevauchement
explosives larmes blanches

entre mes jambes la cage d’une mélodie incontrôlable

Bruno Giffard
Extrait de Plages de bitume - Éditions Lpb.