poètes du monde
Lorsque je bois, ce n’est pas pour devenir gai
ni pour rompre avec les usages, ni pour enfreindre les croyances.
Je ne veux rompre qu’avec moi, je ne veux qu’un instant me fuir.
Voilà pourquoi je bois et pourquoi je m’enivre !
Omar Khayyâm,
Les quatrains Rubâ’iyat, Ed. Seghers Paris
La maison d’hôtes
Être humain, c’est être une maison d’hôtes.
Tous les matins arrive un nouvel invité.
Une joie, une dépression, une méchanceté,
Une prise de conscience momentanée vient
Comme un visiteur inattendu.
Accueillez-les tous et prenez-en soin !
Même s’ils sont une foule de chagrins
Qui balaient violemment votre maison
Et la vident de tous ses meubles,
Traitez chaque invité honorablement.
Peut-être vient-il faire de la place en vous pour de nouveaux délices.
La pensée sombre, la honte, la malice, rencontrez-les à la porte en riant,
Et invitez-les à entrer.
Soyez reconnaissant pour tous ceux qui viennent,
Parce que chacun a été envoyé comme un guide de l’au-delà.
Rûmî
La pilule contre la catastrophe minière de Sprinhill
Quand tu prends la pilule
c’est une catastrophe minière.
Je pense à tous ces gens
Perdus au fond de toi.
Richard Brautigan,
« Il pleut en amour »
(Ed. L’Incertain, trad. Frederic Lasaygargues et Nicolas Richard)
Au vent froufroutent
tickets de caisse, papier-monnaie
les jupes
volettent
petits oiseaux
des couples se joignent en couples
dans le parc
sur la berge
prière de ne pas cueillir de fleurs
prière de jeter les ordures aux ordures
l’eau l’eau
prière de ne pas y toucher
Adrian Kasnitz
Le vers est une maladie. Un dysfonctionnement du corps - qui ne peut pas ne pas intervenir dans la production de sens - intervenir par interruption. Le vers est ce qui se produit à chaque fois que le corps entrave le trajet de la langue - à chaque fois que la langue trébuche sur le corps - et le poème est le son de la chute ensemble de ces deux morceaux que l’Histoire a séparés.
Cédric Demangeot
Amulette
Nous ne vieillissons pas car le temps continue de nous amuser. Avec lui nous jouons, et nous rions de l’éternité ; nous nous en moquons de toutes nos dents, de nos os, de notre interminable usure, de notre soif, qui pour nous mener au cœur de l’ivresse, nous change en sable.
Nous sommes d’ailleurs, et rien de ce qui est étranger nous est indifférent.
Philippe Léotard
La ‘’Nature’’, c’est ce que nous voyons -
La Colline - l’Après-midi -
L’ Écureuil - l’Éclipse - le Bourdon -
Non - la Nature, c’est le Paradis -
La Nature, c’est ce que nous entendons -
L’ Ortolan - la Mer -
Le Grillon - le Tonnerre -
Non - la Nature, c’est l’Harmonie -
La Nature, c’ est ce que nous connaissons,
Mais sans savoir bien l’exprimer
Tellement Notre Sagesse est entravée
Par sa Simplicité.
Emilie Dickinson