La
page
blanche

La revue n° 65 poètes de service

poètes de service

Bruno Giffard

Conçu à Porrentruy (côté paternel), né à Chicoutimi (côté maternel), juste avant les années 80, Bruno Giffard habite le centre-ville de Québec depuis longtemps. Père à temps partiel il passe maintenant les heures à poursuivre un bac multi en criminologie et dépendances, après les petits boulots... Ces poèmes proviennent d’un projet de recueil.




Quelques hommes détachent leurs mots qui s’enroulent avec les bouffées de cigarette sur une courte distance avant de succomber à l’infini – éclosion du seuil.

*

Le serment rose du talon des femmes sarcle une certitude finie d’asphalte. 

*

Jours pareils à du bois mort jeté dans la gueule du poêle

*

La bouche dégage ses rêves
jets filandreux sur la page

Je lance
l’étoffe noire
des mots

rien qu’une présence
qui n’ose partir
de peur que le reste
s’écroule :
les poutres
avec le dialogue

 

notre bouche médite
ce goût d’impuissance
sur des tronçons
de parole

un appel à l’aide
signerait
le départ du souffle

*

Tu te mêles à l’encre courante
par irréfragable espoir
de courir enfin
la veine du paysage

tes seins
prennent des airs de fleurs
dans le désert

sur un fil idyllique
de cerf-volant
mon immensité claque

à la dérive de toi
mémoire affabulée
je me rafistole

*

Je m’accoude
l’horizon fixe aujourd’hui
juste au bord du vide
mes pensées

 

Compter les étoiles
endormir la mort

Le miroir demain regardera
mon inquiétude au teint impersonnel

*

Souvent au milieu d’un terrain vague
debout, l’air de rien
cherchant à toucher au ciel    
la forme du nuage

  

J’apprends encore à lire le recul, alors que s’arme mon hurlement. 
Défense hystérique de peindre le paysage des doigts, 
par la pulpe s’y enfoncer.

*

Magnifique désolation – cette grisaille larmoyante d’automne. La subsistance du vert tourne au brouillard. Des variations crépusculaires s’inoculent sous une plaque d’espace. Les branches nagent à travers charges d’air, et leurs feuillages frissonnent jusque derrière ton front.

*

La tête repose dans une maladie qui rend invisible le lit des idées. Une ville enserre avec un savoir psychiatrique l’horizon au fond duquel elle se dépose. Constante patience de mire précipitée.
Reste aux yeux à divaguer une mer d’espace – avec des fleurs lumineuses qui passent devant un amphithéâtre de cendres figées. Ouvertures en variations grimaçantes.
Au bord du monde la silhouette des songes tremble, à faire le guet – un carré de trottoir tient lieu d’île. Noués au ventre par des départements de froideur, mes poings dans leur quiétude colérique tracent un embryon de prière. Je pense alors à tes lèvres – ailes sur les degrés thoraciques.

*

Tes yeux par le détail me déraillent le cœur.

Mais à ton visage, l’immunité du rayonnement.

La qualité douloureuse du plaisir m’arrête devant des valeurs d’avant le fer. Alors que ma foudre fouille tes lamentations, touche par les entrailles au nid électrique des assises rocheuses.