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AUTEUR-E-S - Index I

105 - Geoffroy Emmanuel Floret

Le Chaos



KO   

                                                                              KO

  Le Chaos

Geoffroy Emmanuel Floret


       KO    

                                                                             KO




Un nouveau copain


 Je viens de rencontrer un arbre

Qui a une drôle de tête

Il a l’air sévère et sérieux

Et fait la moue

 Je pense sans aucune palabre

Que je suis le seul

Sur cette planète

Mais il est là fier droit et sans le sou

 Il a une chevelure incroyable

Qui donne à penser

A la profondeur de ses racines

 Non ce n’est pas un érable

C’est un bouleau moqueur

Qui rêve de piscine



    Ricochet


 J’aime bien ce lac.

Je viens souvent au matin souriant, pieds nus, respirer.

Je sens l’herbe profonde, sous ma plante, Imprégné de l’humeur du jour.

Paisible respiration.

Mes pas me conduisent

Toujours au même endroit,

Vers ce vieux chêne.

J’aime m’y adosser,

Ecouter

En corps 

Et encore

Le monde et sa respiration.

Toujours au même endroit,

Sous cette branche robuste,

Là, où mon père s’est pendu.

 Ça me rassure.




    Le pain



 Le goût du pain

Porte en lui la promesse

D’y revenir

Comme une altesse

Peut mentir 

Pour assouvir

Son désir

De la farine de la levure

Et de l’eau

Voilà tout 

Béni, il a la dent dure

Pour les sots

Il a bon dos

Pour les affamés du paletot

C’est du soleil en morceau

Et pour toi, moi, vous 

Un compagnon de goût

Et puis l’odeur du pain

Tout juste cuit

De la croûte à l’ami

Le copain

Le pain se partage au présent




Volutes


 L’insouciance de l’enfance

Se bécote en silence

Entre les murs de l’insolence 

Même les ronces s’en balancent

A vivre en toute innocence 

Elle est douce notre France

 J’aime les bignous les froufrous

Les ritournelles de la vielle

Les carrousels à un sens

L’accordéon des fous

Le bal musette à ton cou

Elle est douce notre France

 Il y a un temps pour le chiendent

La guerre la misère et le sang

Il y a un temps d’hiver gelant

Mais moi je préfère le printemps

Les primevères sous le vent

Elle est douce notre France




  D’aujourd’hui et d’hier


Le bruit des voitures me stresse

Le béton m’agresse

La télé sans cesse

Me botte un coup de pied aux fesses

Les politicards m’oppressent

Les meufs s’engraissent

Ma tolérance régresse

Les minots HS

Le fric qui rabaisse

L’électro et ses prouesses

Me font l’humeur vengeresse

Et laissent

Ma rage et ma haine 

Hurler leur haine

 Et pourtant

 Moi je valse à mille temps

Sous un azur nappé de blanc

Et je chantonne aux sentiments

La chanson des vieux amants

J’ai dans la caboche

La mémoire et la mer

Les anarchistes

En tricotent les vers

Enterré sur une plage de Sète

Le moustachu est à la fête

Quand dans la nuit 

Surgit un aigle noir

De Göttingen jusqu’à Paname

C’est toujours la même histoire

La chanson des loubards 

Me colle à la peau

Sur les grands boulevards 

Et tous leurs tripots

Emporté par la foule

Des matins qui dessoûlent

Un hymne à l’amour 

Couve ce monde de tours

Des HLM blêmes

Dans la zone du huitième

Face à la ballade des gens heureux

Qui n’ont pas peur d’être eux

J’aimerais vous dire

Comme chantent les fous

Que ma plus belle histoire d’amour

C’est vous





 La tambouille


 Ici, On coupe, on émince, on tranche, on cisèle, on râpe, on désosse, on lève, on ficèle, on hache, on dénerve, on saupoudre, on sale, on poivre, on épice, on farine, on sucre, on barde,  on farcit, on malaxe, on pétrit, on saute, on caramélise, on saisit, on rissole, on marque,  on pique, on larde , on aille, on flambe, on huile, on vinaigre, on décortique, on épépine, on attendrit, on cuit, on mijote, on braise, on harmonise, on réserve, on ébouillante, on mitonne, on stérilise, on écosse, on égousse, on effile, on naît graine, on émulsionne, on fouette, on remue, on ébarbe, on épluche,   on pèle, on équeute, on glace, on nappe, on enrobe, on lève une patte…

Bref ici, on cuisine !

Une pizza c’est rond,

Elle est livrée dans une boîte carrée

On la mange en triangles

Alors la logique,

On en parle ?





        Tic… Tac… Tic… Tac… Croque


 Je suis la mort et je croque

En vos horloges qui débloquent

Toutes époques emmêlées

Je toque

A la porte

De vos vies rêvassées 

En aucune sorte

Vous ne pourrez échapper

Aux minutieux calculs

Qui vous mènent

Inexorablement

Dans mes appartements

Semblables aux cellules

Où vous vous rongez les sangs

Je suis la mort et je croque

Vos âmes piètres breloques

Où toutes époques dédaignées

 Je troque

Au Cerbère de la porte

Vos vies essorées

Et voyez ces cohortes

Destinées aux charniers 

De somptueuses et tristes pendules

Inlassables sabliers

Qui vous rongent les sangs 

Notent inexorablement

Vos tics impertinents

Je suis la mort et je toque

Tic… Tac… Tic… Tac… Croque




                   Le chaton et le vieux


 C’est l’histoire d’un chaton

qui n’était pas mignon

mais alors pas mignon du tout !

Pis encore ! Il en était fier ce grigou !

En permanence il paradait ça et là

des riches rues, en journée,

aux misérables égouts, la nuit tombée.

Il miaulait comme vache qui pisse

sous l’impatience des fenêtres, et comme le bon vaurien qu’il était,

se battait, pour un oui, pour un non,

voire même pour un peut-être.

Tout le monde le détestait,

Sauf le petit vieux de la fontaine,

Un grigou à la retraite

Qui jetait du pain,

 tout en gueulant à leur passage,

à des pigeons de haut vol,

cette engeance d’escrocs sans chapeaux.

Ils s’entendaient fort bien,

tous les deux, le miteux

 et le grégaire, seul et malsain.

Même entre eux ils se gueulaient dessus .

Mais la nuit venue,

une fois leur venin soulagé,

ils allaient, en boitant de méchanceté,

médire de l’odieuse journée.

Ils choisissaient un endroit

Où poser leurs cartons.

C’est souvent le chat qui le trouvait.

Après quelques éructations grasses

mêlées au feulement crasse du chat,

les étoiles planquées tout là-haut,

ignorant l’ignominie et les cruautés

de ce couple écœurant,

écoutaient en dansant,

la respiration profonde du vieux croquant,

habillée du velours ronronnant du chat aimant.

Souvenez-vous en…

Quand les tempêtes enlaidiront vos charmantes vies,

souvenez-vous en…

quand vous subirez l’absence d’un ami,

souvenez-vous qu’un grain de soleil

même venu des latrines n’a pas de prix.





Le ballon ovale qui rêvait de s’arrondir



 Bien mise en évidence dans la salle à manger, trônait un buffet de style et bien ciré. Dans les tiroirs du bas, tirées à quatre épingles, empilées, baillaient des serviettes brodées et leur chère nappe. Sur la crédence, quelques napperons et autres bonbons de fine porcelaine embellissaient un ménage heureux de sa condition et, derrière les portes finement vitrées, paradaient, superbes et magistraux, les services à verres : la finesse du calice, les tendres baisers cristallins, les jambes d’une insolente beauté, les tulipes gourmandes de bordeaux, ou les plus gros ovales, taillés pour les somptueux bourgogne… ils défilaient, fiers et immobiles, prêts à servir. Les repas des grands jours nécessitent toujours une outrancière élégance. L’une de ces fleurs ovales avait cependant tendance à jalouser les  autres verres, les ordinaires, rangés dans un buffet de misère, en cuisine, où dans un joyeux désordre  tout à fait assumé, se mélangeaient des verres de toutes les couleurs, de toutes les formes, rarement plus de trois semblables, soufflés comme des chiffonniers. Et il y en avait un en particulier, qui servait plus qu’à l’accoutumée pour qu’on s’en jette un petit… Un verre modeste, épais, qu’on appelait ballon. On le remplissait, on le vidait, entre les rires et les ragots. Et tous les soirs quand se taisent les chandelles et que toute la maison dort, un verre ovale rêve de s’arrondir…





         Lucie


Je vais toujours la voir dans sa prison, Lucie,

ma Lucie qui était si jolie.

Elle a mis un coup de frein à main dans sa vie, Lucie.

A force de la pourrir ses codétenues

ont été pires que le bras d’une Justice aveugle qui prolonge son supplice.

Elle était pourtant si jolie, Lucie,

Elle se conduisait prudemment Lucie.

L’hiver et le verglas s’étant durci, elle soignait sa conduite aussi.

Elle roulait au pas, jusqu’à son école, Lucie, pour dispenser son enseignement aux enfants de la vie, quand une grosse voiture vulgaire et toujours pressée,

l’a klaxonnée dur dans les tympans,

pour qu’on la laisse passer devant.

Surprise un petit peu,

 effrayée surtout, en un instant réflexe,

elle mit un léger coup de volant

pour laisser passer le monstre bruyant.

Et là, sa vie prit un tout autre tournant.

Je vais toujours la voir en prison , Lucie,

ma Lucie qui était pourtant si jolie

Tout le monde l’appréciait, en faisait compliment. Elle était souvent la meilleure amie.

Le verglas aidant, les bandes blanches indiquent le passage aux piétons.

Elle glissait comme au ralenti, Lucie,

vers un groupe d’enfants en sortie pédagogique.

Elle ne pouvait plus rien faire, Lucie…

Simple spectatrice, elle vit la voiture en blesser cinq.

Deux en moururent sur l’instant.

Sa vie  à elle aussi était foutue, hantée par un présent perdu.

Elle subit les courroux des parents

qui la pointaient du doigt, sabre dans le gant,

et les procédures sans âmes.

Tous unirent leurs armes

pour la jeter une fois pour toutes,

dans un cachot sans voûte, ni fenêtres,

où ses compagnes nouvelles lui arrachèrent

ce qui lui restait d’humanité.

C’est un zombie à présent ma Lucie. Je retourne la voir de temps en temps.

Mais une autre forme sans vie

 se meut à sa place, orpheline de toute émotion.

Moi je te pleure tous les jours Lucie, ma jolie,

maudissant à cœur et à cris

la grosse bagnole et les enfants innocents

qui ont mis mon âme en chagrin, en m’enlevant ma Lucie.

Je ne viendrai plus te voir de temps en temps, ma Lucie.

L’effroyable néant qui nous sépare maintenant

est trop lourd à porter vraiment.

Pour clore la beauté du geste,

je ne t’ai pas dit, Lucie,

que toi à ce moment précis, Lucie,

tu attendais mon enfant.




           Menteuses vérités


 La vérité n’est qu’une illusion

sur laquelle on s’accorde

La réalité n’a point

de miséricorde

Elle est sans gentillesse ni cruauté

juste un miroir

 une réplique

de ce que l’on se force

à croire

en supplique

A chacun douze heures

à sa porte

cela fait beaucoup de midis

Si la pluie reste la pluie

qu’importe

le soleil du voisin

tant qu’il n’ombre pas

nos pas tant qu’il nous laisse nous perdre

las et voluptueux

dans l’exquis chemin

des expériences

qui nous forgeront

ou pas

A pile

ou face

le choix

de ne pas avoir à faire de choix

n’est qu’une vérité

une illusion





            Le match


 Les Bariolés sont pris en seringue dans cette mi-temps tandis que les Bleus donnent l’impression de maîtriser leur sujet. Oh ! le contre inattendu, le réveil, l’orgueil des Bariolés qui tentent une échappée. Oh ! la ! la ! Regardez-moi cette souplesse, ce jeu de jambes impeccable qui vient à bout de un… deux, trois barrages ! C’est énorme ce que font là les Bariolés, même si on assiste à un renfort de la défense des Bleus, submergés par les Bariolés qui jouent à domicile, rappelons-le.

Les Bariolés qui insistent, les Bariolés qui ruent dans les brancards. Ça tient du miracle ! Les Bariolés veulent mener l’action jusqu’au bout. Ils sont à deux doigts de remporter le…

Oh ! Mais qu’est-ce que c’est ? Un Bariolé s’effondre soudain. Un coup de feu est parti.

Sous une salve d’indignation le public réclame un arbitrage vidéo et … la vidéo confirme ce que le public n’a pas ignoré de voir. On attend impatiemment, dans la plus grande confusion, le verdict de l’arbitre. Les Bariolés crient au scandale et les Bleus à leur légitime défense. Que va dire l’arbitre ? Il parlemente avec ses adjoints sur la touche. Après mûre délibération, incroyable ! L’arbitre donne le bénéfice du doute à la légitime défense. Le public est scandalisé. Les Bariolés crient à l’escroquerie. Espérons que le match où les Bariolés ont frisé le miracle ne finisse pas dans la rue, à l’air libre du tout-venant…

Merci…merci… Il est l’heure à présent de vous quitter pour la suite du programme. Nous vous garderons bien sûr au courant de l’évolution de cette triste affaire et avant de retourner à votre programme, n’oubliez pas de manger cinq fruits et légumes par jour et ne parlez pas aux inconnus.

(Violons et clochettes se chargent de la transition)

Le petit Abdel est mort. On voudrait le pleurer mais on ne peut pas. Abdel a fait de trop nombreux mauvais choix. C’est pire encore. Les émois, les réflexions et les débats que suscitera ce fait-divers nous distraira quelques jours de l’essentiel entre deux spots publicitaires. Et puis on rejouera le match encore et encore. Triste sort.

Et n’oubliez pas de renouveler votre abonnement pour plus de cadeaux encore à

« La Française des Je »




                    Depuis que des brebis ont pondu des loups

tout est sens dessus dessous même s’il est vrai

que le dessous des uns fait le dessus des autres.





                  Chant des crépuscules


 La guerre s’en vient mon ami

La guerre s’en vient

Pleure, crie et colère tout ton saoul

Danse et chante pluie

 La guerre s’en vient mon ami

La guerre s’en vient

Bois tout ton trou Et mange vie

 Nul drapeau, nul repos

Juste des os, Sangs et eaux sous la peau

De Damoiseau

 Les terres brûlent mon ami

Les terres brûlent

Au levant le couchant se crie

Comme charogne émascule

  Les terres brûlent mon ami

Les terres brûlent

Valsent les aiguilles du temps

Grises les ombres circulent

 La paix nous meurt mon ami

La paix nous meurt

Ivresse et frénésie s’entretuent

Et  violent l’honneur




                Génération perdue


 Je suis de cette génération 

Qui se faufile entre les obligations

Remonté comme une pile

Vous façonnez le monde où nous vivons

Nous en sommes désolés, croyez-le bien

Je suis l’enfant

Qui tartine sa biscotte avec un soin particulier

Dans la hantise de provoquer un séisme

Où se lézarderont les failles qui détruiront

La terre en sinistres cicatrices

Ce petit garçon je reste

A prendre le temps 

De sauver son oiseau imaginaire 

Qu’il a trouvé au détour d’une pensée noire

Je suis l’adolescent mal luné

Qui frissonne au premier nuage venu

Je suis de cette génération perdue




          Les bombes à retardement se paient toujours au comptant.




                 Bestiaire


J’étais là, avec mon manteau mou, mon chapeau noir, parapluie en main, on ne sait jamais, et les pieds à dix heures vingt.

Soudain un éclair blanc vint trouver mon équilibre. J’étais à peine remis de mon désarroi et encore désappointé par cette mésaventure, qu’un chien en casquette avec une sacoche au cou, me tapota l’épaule. Il me demanda, les oreilles à l’affût :

« Vous n’auriez pas vu passer Major ?

-       Qui est Major ?

-       Mon chat.

-       Si vous parlez de cet éclair blanc , oui je l’ai vu.

-       Et dans quelle direction ?

-       A l’est.

-       A l’est ? Tiens donc ! C’est étrange… »

Et lui aussi se rua à l’est.

Et je les vis réapparaître, le chien sous sa casquette et le chat blanc avec un joli nœud papillon noir. De loin en près je voyais le chien donner des ordres simples, tout ce qu’il y a de plus sommaires, au Major qui s’exécutait.

Quand ils furent arrivés à ma hauteur, je ne pus m’empêcher de glapir, curieux :

« Excusez-moi mais ceci m’intrigue. Qu’est-ce qu’un chien fait avec un chat ? Ne dit-on pas « s’entendre comme chien et chat » ?

-       Effectivement, me répondit le canin, comme il est sûr aussi que les chiens ne font pas des chats.

-       Alors comprenez ma surprise !

-       Oui monsieur. Les chats ont du bon sens et sont incapables de  goûter à  la stricte volupté du dressage. C’est pourquoi il faut les domestiquer.

-       Ah bon ? et pourquoi ?

-       Parce qu’un chat bien domestiqué fait un excellent majordome. »





L’automne des sens


 Je n’ai pas faim

Je n’ai pas froid

Mon ventre est plein

Pour une fois

Il me faut vêtir

Pour être bien

L’odieux costume

Du sobre

Qui écume

Les joies, les failles, les défaites

Qui sont des victoires

Ces envies

Qui braillent en silence

Je m’en nuit

De ce monde trop carré, trop parfait

J’écris, oui ! J’écris, moi

Le crache-mégots

J’écris pour les sots

Pour les édentés du boulevard

Pour le sinistre carnaval

Où trop de pipeaux tuent le pipeau.




Les troquets


 Les troquets sont merveilleux 

De l’ennui pittoresque

A l’affrontement brutal

La poésie en perd ses verres

La magie se cache

Sous le moindre mégot

Elle taquine espiègle

A leur propre piège

Les qui savent tout

Et qui sont bien heureux 

De le faire savoir

Entre les bougonneries 

De la tenancière

Et la puanteur âcre

De ceux qui dépensent

Ce qu’il reste

A grands coups de rosé

Et puis il y a moi

Silencieux

Ami de mon précieux carnet

Les oreilles aux aguets

A colorier

Les troquets sont un jeu

Où le réel devient fresque

Le modeste d’énergie pâle

Trouve un inconnu

Pour frère

Le temps qu’il reste

Des sous

Pour partager ses maux 

Ou ses visions d’aigle

Les braves peureux

Font la foire des bavards

Entre les ronchonneries

Du tenancier fier

Et la puanteur âcre

De ceux qui pansent

La vieille peste

Comme on polit 

Un vieux trophée

Et puis il y a moi

Candide, goguenard

Aux aguets

Aux chevilles enflées

A chanter déplaisant

Les hommes tels qu’ils sont



  Le bec cassé


 Je sers de becquée

 Aux entrailles du feu

Il ne plaisante pas le feu

Avec le pieux

Et l’inavouable désir

De se prendre pour Dieu

Mariant sans vœux

Le pourpre et mon repentir




                            L’orgueil est la plus grande force de la défaite à venir

Mais vous avez tant souffert de me voir couler ma propre galère``




     Muse à lier


 Il n’y a rien de plus terrifiant

Qu’un miracle

Ça laisse un goût amer

A la suite du spectacle

Ma muse m’a abandonné

Dans le caniveau

Oh ! je sais un nuage noir 

N’est pas toujours un signe de pluie

Mais faites attention tout de même

Si les murs ont des oreilles

Les ténèbres elles, ont des yeux

Et vous paissent en toute débâcle

D’illusion

Ce mensonge qui accompagne les vérités

Même celles de trop

Surtout celles de trop

Alors Je divague dans cet océan embrumé

Maintenant que

Ma muse m’a jeté dans le caniveau



  Pis que pendre


 J’ai fait bien pis que pendre

Je me suis flingué

Dans le bas-côté du quartier

Sous l’œil impatient

D’un noir corbeau

Qui attendait sa pitance

 Allez viens corbeau des cendres

Jouer du bec dans mes tripes

Prendre mes yeux en grippe

J’ai fait bien pis que pendre

Alors je me suis flingué

Dans les bas-fonds du quartier

 La sournoise nuit m’a appris

Que tout ici-bas a un prix

Mais à ne pas vouloir me vendre

A ne pas avoir tué mon enfance

J’ai fait bien pis que pendre

J’ai interdit à mon noir soleil 

D’EXISTER



La pelle


 Je vis dans l’éclat 

Dans le terne

Du funeste

Je suis un poids

Dans un écrin 

De pacotille

Je suis celui

Qui muse

Qui s’use

 qui s’ennuie

 Un trouble

Vieillissement

Pour tout décor

Sans contentement

L’aurore vient encore feutrée

A peine humide te susurrer les maux d’après

Ceux que hier tu n’as pas écoutés

Pensez aux mirages de la peine

Pensez à ceux qui creusent

Ce qui creuse

Qui creuse




 L’être sans somme


Un trou 

De corps et d’âme

Un vide qui n’a pas lieu

D’être

Et pourtant si présent

Un tourment

Sans nom ni paraître

Tranchant comme une lame

Cette creuse impression 

De naviguer sans vue

Sur le bateau des autres

Ecumant

De tous les océans

Ces rocs de terre

Où se vautrent

L’amer et le déçu

Sans invitation

Une maladie te ronge insidieuse

Tu n’en peux contempler 

Que les dégâts

Sur toi

Sur ton entourage aimé

Dont l’aura vicieuse

Fait de toi

L’impie

Le bourreau

Le salop

Le qui comprend pas

Le qui fait payer aux uns

Le malheur des autres

Et vice versa

Celui qui ne respire plus les fleurs

Mais qui les coupe

Celui qui ne voit plus dans le soleil

Qu’un sujet de brûlure

Celui qui s’enfuit de lui-même

En lassant les autres

Celui qui pleure

Parce que son heure 

Ne vient jamais

Celui qui rit

Faute de mieux

De ses désespoirs maquillés

Qui se croisent élégants et sans pitié

Cet être de chair et de vent

Délaissé par les nuages eux-mêmes 

Ce rêveur sans sommeil.