Le dépôt
LETTRE DE FEU
LETTRE DE FEU
J’ai rêvé cette nuit que je traversais la France de bas en haut, de haut en bas, de fond en comble, comme on lève une main
Mais mes points d'arrivée étaient trop excentrés de mes sources de désirs
Je parcours le monde le jour et la nuit
Je traverse des lumières poreuses des couleurs hideuses
je m'agite entière dans des cartes postales
je coupe des morceaux de terre des grands voiles du ciel que j'ajoute à mes soutes
je fais du monde, de ses cent visages une lettre de feu
que je t’envoie, essoufflée
et tu ne me réponds pas
Je sens encore les morsures du requin sur l’épaule
les bouquets de roches et d’azur vif posés sur ma table
Le monde est un puzzle, un trésor qui se déplie sur des nuits géantes
je l’agite, je le plie, le recouvre de saveurs, le mélange aux dieux des danses et du rythme
il prend sous mes mains
des allures de nymphes éclatées par des eaux trop gourmandes,
des allures soyeuses qui crissent sur des rails qui entaillent ses peaux
pour la seconde où ton buste vers moi s’est tourné
j’avais enveloppé dans des aquariums itinérants des sabres calcinés qui brisent les chaînes qui alourdissent des goélands somptueux
Ceux qui bravent des continents de soufre et d’argile
pour prendre la couleur des Enfers et la diluer
comme un filtre d’amour sur le monde enneigé
j’avais réuni sur une terre immaculée la totalité
de mes trésors de voyage qui ouvrait sous les pas de celui qui le traverse
des parcelles de souffles célestes, qui tombent sur ses yeux et les remplissent de voies lactées,
des milliers d’étoiles
Il ne me reste qu’un lointain souvenir de toi Et j’ai les mains qui coulent
Et j’ai les mains qui pleurent
des pluies
d’étoiles filantes
Je ne te toucherai pas
Car déjà j’ai la peau qui brûle au souvenir de ta voix Tu es tous les dieux de mon ciel
L’objet de tous mes voyages mes pensées et mes mots En excès sur tous mes mondes
Ta main qui m'effleurera me tuera