Le dépôt
Et que rompe l'amarre... (5 poèmes extraits du recueil)
Ensauvageons nos vies
Accueillons l’irruption de l’animal
Et sa stupeur altière
Surgissant du fourré
Chantons
L'épaisseur du temps retrouvée
Avec sa couche d'ennui
D’effort
Et de silence
Nécessaire à toute semence
Avec son tempo propre
D'immenses étendues planes
Et de soubresauts bondissants
Sans nulle autre horloge que l'ellipse du soleil
Le tintement des carillons
Et la boussole du cœur
Réensauvageons nos vies
Mettons nos pas
Dans celui du chevreuil
Tapi dans le sous-bois
Laissons entrer le mouvement
Le vibrant
Prenons le temps
De nous perdre
Au cœur d’une forêt
Pour y goûter
Sous un déferlement soudain de feuilles
L’abrupt du vivant
***
Vivre dans la grâce
Traverser la vie
Avec
Grâce
Non voulue
Mais dansée
Née de l’accord long
Et consciencieux
De la lyre du cœur
La souplesse de l’esprit
Et l’ivresse joyeuse du corps
***
Je suis celle qui murmure
Dans l'ombre
Je suis celle qui chante
A ceux qui savent tendre l'oreille
J'écoute la vague
Au creux du coquillage
Tapie dans la pénombre
J'engloutis la matière
Et ne retiens que le parfum
Je ne sais ni marcher
Ni parler
Mes mains n'agrippent que le sable
Et mes frontières
Sont vagues
Et frissonnantes
Je suis celle qui chante
À l'intérieur
Ce que ni toi ni moi
Ne comprenons
Publié dans la revue Florilège n°185
***
Le poète
Rend ses frontières
Poreuses
Jusqu'à devenir le monde
Puis se referme
Comme une huître
Sur son grain de sable
Pour enfanter
Ce tout petit objet
De faïence
Merveilleuse
Un petit coquillage
De poème
Un monde clos
Dans des vertiges de nacre
***
Le pied sur le sentier
Arpentant le chemin
Portant
Suant
Grimaçant
Souriant
Le nez au vent
Sentir
Son corps
Exulter
Non pas de joie
Non pas de douleur
Mais de cette infusion étrange
Complexe mélange
Engendrant
L'être
Là
Entre soi et le monde