Le dépôt
Mécanique de la mélancolie
Mécanique de la mélancolie
Mécanique de la mélancolie
(inédit)
j’ouvre
néfaste patience
le tranchant
d’un jour flétri
*
pas du noir
ni du gris
trop cendres
de la couleur
qui englue
de la boue
mélancolie
*
désunité
de temps et de lieu
juste un coup
à l’estomac
boues intimes
marquent le visage
et
masquées par le visage
*
un regard
une main tremblante
l'absence
encore une pelletée
la source
les soleils bâillonnés
*
et l’on voyait
entre mensonge et méchancetés
mourir les mots
sous les morsures d’acier
*
ici éloigné
quelques traces d'absence
un fil secret
me retient de toute averse
*
jour bâti comme un hiver
sans sa charpente-lumière
comme oublié des ombres
jour sans la mer en relief
juste un vent-piège
à border l’absence
jour balaye ses feuilles
et me rentre près du chat
endormi sur le poème
*
conserve de ma jeunesse
la plainte au jour
l'ombre
sous chaque pas
tant d'amour jamais
quand chaque baiser
aiguise l'absence
*
le matin fait cri
à contre brume
le sommeil
vite lavé
bonjour hors baiser
hors tendresse
*
l’ombre
en garrot
aucun oiseau
pour lui déchirer
l’aile
j’étouffe
*
cueillir l'équilibre
ne se traduit pas
chute inévitable
la preuve par le sol
seuls les chats
et peut-être les ombres
connaissent le nom
du tombé d'âme
*
un goût de terre contre
le goût de fer
les regards d'étain
la carcasse d'un chant
bâillonné de ronces
et ridé de larmes
*
mille détours
absence
toujours maintenir
la parole en filaments
*
seul le linceul
chiffon sur ces nuits
chavirées d'absence
*
rouge mensonger
- un halo s'est fourvoyé -
rouge deuil
où s'embrasent les ombres
puissent mes espoirs
succomber sans trace
*
comme l'arbre
tombé
racines à l'air
quand la douleur
quitte l'ombre
le passé fait cri
c'est le remord
qui pourrit
les chevilles
*
à la fenêtre
s’invite
l’hiver
journées
sans rencontre
saccagées d’ombre
le temps passe
pire que neige
*
et l'Homme
se sent plus petit
chairs en friche
en lit desséché
chemins rebroussés
et paroles en l'air
ne lui est acquis
pas même le jour
que cette peau de paille
qui s'enflamme
à peine étreinte
et qu'il abandonnera
un jour
*
d'amour, une terre dévastée
comme une ombre, puis rien
comme un rempart déchiré
un soleil enterré
dans l'impossible danse
de nos destins arides
*
la nuit, le sommeil
les destinées s’apaisent
et les horizons s’entremêlent
l’enfant est tombé de son lit
et moi j’ai peur
de mourir sur ta poitrine
*
à peine les chiens
se sont-ils emparés
de ces lambeaux d'horizon
qu’une boue
s’est emmêlée
dans la lumière
*
je me prends
pour un autre
mais mon corps
reste seul
si j'étais
moi
mon corps
serait autre
*
dans la bouche
la soif, le sel
il n'est plus de rive
pour la voix
tout chant épanché
reste plainte
les mots
ne font plus salive
à l'éveil des sables intimes
un cri blanc
*
les yeux criblés
du revoir
desséchés
de l'attente
n'était ce que paupière
que cette pénombre
*
dehors rien ne bouge
des murs ont été plantés
pour éluder les questions
des vents des passants
ni chat ni oiseau
– qui a perdu l’autre ? –
quelques feuilles emprisonnées
ont renoncé
à colorer le ciel
il ne suffirait qu’un pas
*
le soleil a enterré
ses jouets
– brûlé sa danse
du froid de la main –
la mort
prend lieu
dans l’affleurement
des secrets
*
issue de poussière
ces brasiers déjà
nul ne demeure sa vie
*
prend bien soin de tes semelles
il ne faudrait pas revenir
avec un pas égaré
les fossés ont des oreilles
et tu ne saurais
y échouer tes rêves
*
les yeux de craie
– qu’importe la fenêtre –
s’effritent au bleu
du temps passé
il n’y a plus de pas
pour aucun chemin
ni de danse
pour quelconque lumière
*
à quoi notre vie
s'ennuivre
une vulgaire douceur
sans relief
quelque l’autre
en plus du moi seul
où est l'entrée?
*
© Denis Heudré 2012
Tous droits réservés
Reproduction interdite
le jour boitille
appuyé sur son passé
des cheveux impertinents
sont venus l'incendier
et la mécanique de la mélancolie
s'est arrêtée