Le dépôt
Les voix désarticulées - Les derniers mots sont bégayés
Les voix désarticulées
Hier la saison jaune fut annoncée par les créatures de l’impossible Des mains étaient tendues au vent qui passe dans l’éternité et voilà qu’un être acrobate est sorti de la mer sur un fil tendu entre les lampadaires fourbes et des immeubles dorés, ne pouvant nommer ce qui l’avait poussé ici il passe sur un chemin empoisonné
Des voix par sous terre sont nées elles ont parlé la haine la haine la haine est nôtre Des liennes des louves des méduses accablées Étouffant, dégoulinantes de sueur et d’alcool elles portent ces voix avec elles les font exploser dans leurs pas leurs grands pas aux allures de lionnes enragées
le petit être effrayé est retourné dans le ventre de sa mère être tout un à la fois reprendre sa force et sa voix
reprendre la vie être entier et vivant, être immense à deux en un
les lionnes ont gonflé gonflement du tonnerre, la vague immense des mots oubliés
tous les discours en abondance
les créatures de l’impossible sont quelque part dans une saison que l’on ne connaît pas les créatures de la peur, toutes ensemble pour crier
nous existons par la victoire de la boue sur le ciel pourtant l’air libre a troué nos poumons
oui il faut mille êtres qui parlent pour entendre quelque chose mais trois fois rien pour crier
l’être acrobate depuis le ventre de sa mère raconte des histoires terribles
de créatures joyeuses qui ont mangé le ventre de leur mère pour naître sur terre
Des voix sur le ciel forment des météores magnifiques qui aspirent tout la vie le désir et l’amour
elle tournent en cercle en triangle elles rampent elles dansent elles s’animent mais elles
elles sont faibles ça peine à tomber puis à être un rire là-bas est ici un rayon de soleil à l’aurore
évidemment elles bredouillent des sursauts Nées d’un désert noir sans matière
rien à dire elles s’accrochent et se griffent pour faire des couleurs des éclats pour dire quelque chose elles engendrent du vide ne parlant jamais de rien en faisant toujours beaucoup de bruit
des mères sont déchirées par l’intérieur du ventre elles vocifèrent par l’intérieur du ventre, le cri naissant
perçant éclaboussant déchirant tout tout sur son passage, âpre, vide l’enfant qui ronge et qui dévore
l’être acrobate qui naît et qui détruit la mère l’enfant qui mange sa mère depuis l’intérieur du ventre
vorace hargneux
à l’autre bout de cette parcelle de mer des nouvelles lionnes, émergées par sous terres monstres aux entrailles ensanglantées errent, livides, l’oeil noir à l’affût d’un petit être à dévorer
les créatures de l’impossible se se sont alignées, tremblantes sur un rayon de lune immaculé
l’orage passé sur leur peau rouge
l’une d’elle s’est avancée pour dire qu’elle coule comme un magma immense que son bras hier est parti sans elle sa soeur, la jumelle éclaboussée a chuchoté des choses étranges et grandes que l’on a n’a pas comprises
elle a essayé encore une fois mais ses yeux sont partis les autres autour excèdent son monde en tous points rien à dire monde à vomir
les voix des monstres, ensemble, de très près : un grognement qui fait trembler la mer traversant toutes créatures unes à unes
en Chair le grognement a muté une autre créature est née les voix des monstres, de très loin :
elles râlent un soupire entrecoupé de bâillements
des gorges géantes des langues qui n'arrivent pas à articuler du Sens ou quelque chose
c’est un brouhaha de voix qui essaient de parler qui peinent à sortir des voix qui ne sont rien qu’un souffle incertain
toutes les voix en même temps et tous les mondes à dire ne suffisent pas pour couvrir le bégaiement du monstre
l’insuffisance complète la voix qui souffre qui tombe
l’être acrobate la mère meurtrie de l’intérieur les créatures de l’impossible, les créatures de la peur ensemble
extraient leurs derniers hululements sur l’explosif ensemble un bégaiement géant et monstrueux
les voix désarticulées sont armées jusqu’aux dents
Les derniers mots sont bégayés
Plus rien dans les mains. Qu’un goût de passé dans la bouche
Cette guerre qui n’est pas la mienne. Qui passe si vite à mes pieds
Plus rien sur terre, la dernière saison est passée. Nous avons lu tous les papiers
et une météore s’approche. Plus rien dans nos yeux éteints que cette guerre a brûlés,
les yeux tombés. Je n’ai plus les mots je n’ai plus le temps. Les chairs meurtries hurlent hurlent encore un peu là bas ailleurs. Le ciel consumé appelle autre chose. Autre chose maintenant que l’absurde qui rigole qui passe et languit. Où irons nous trouver du Sens et des mots, des hommes à aimer, des visages décuplés ? La chair abîmée rampe doucement. Bientôt un jour peut-être. Les soleils les ciels pluvieux les ciels heureux, les bagages sont lourds lourds à porter comme ce sentier immense.
Plus rien dans la bouche plus rien encore une fois. J’ai bégayé, j’ai hésité parce que je ne sais
rien rien d’autre, que je ne sais rien rien rien ri en. Ma main est loin elle aussi et je la vois maintenant là-bas dans ce ciel qui n’est pas le mien nous allons nous passons. Dans le vers advient la douleur mais la douleur n’est pas victime la douleur est un cri un bégaiement en même temps
et je parle en criant en hurlant en même temps Et toutes les voix en même temps : “Demain c’est la fin du monde ! Demain on meurt !”
Il faudra parcourir des continents entiers de peurs pour vous rencontrer, vous, êtres d’argent élevés et sculptés à l’image de la vie qui renaît. Nous ne vous trouverons certainement pas, les créatrices vous ont cachés. Les clés nous échappent le sablier file à toute vitesse. L’être de douleur a esquissé l'énigme de la vie. les questions sont en train d’être posées. Les savants sortent leurs grands livres, les petits dictionnaires. Mais les définitions ne suffisent pas pour répondre à le genèse, un grand commencement. Des musiciens parlent les langues du bégaiement de l’indicible et de ce qui passe toujours. Ils raquent sur leur morceau de bois. Des paroles des notes diluviennes, le rythme phénoménal.
Les professeurs n’en disent pas tant. Ils ont maintenant tout à apprendre. Rien ne passera plus peut-être. Les couleurs, les bruits se mélangent les cendres sont nouvelles. De loin, tous bégaient personne n’a la réponse. Des poèmes extraits du chaos pleurs sur les têtes éprouvées la création est absurde mais jolie. L’effort est divin, il prend des ampleurs de soleil. Les questions posées se posent encore.
Mais ces langues qui pendent pour parler forment un bégaiement géant, le plus implacable grondement de bégaiement petits bruits inspiration expiration expiration rigolote râle peut-êt cla asss.... iliiiiaa
Des grands yeux sur un visage d’homme. Et ce petit être là pour aimer ce visage ci. Rien qu’un râle bruyant, des couleurs de l'Aurore ici.
Une main joliment coiffée portée à une bouche qui a faim. Et qui crie qu’elle a faim. La fin du monde
de toi de moi de nous.
Toutes les questions en suspens les réponses qui n’ont jamais existé. La vie accrochée à une toile d’araignée colossale un petit doigt qui montre une voie la lumière rouge sous des longs cheveux rouges et épais tes grains de beauté projetés au ciel la voie lactée, les printemps disparus
le ciel et toi vous êtes des immenses incendies la fin du monde vous donne un rayon de tempête les fourmis circulent en sarabande
et les chevaux meurent meurent meurent
Des poètes sont nés car la marmite de la sorcière a explosé sur un cristal de lune. Les voisins ont bu tous les champagnes habité tous les lieux raconté tout l’amour
Il ne me reste plus que quelques lignes
que quelques mots avec ces restes de mains extraits du chaos. Le corps imparfait maladroit tremblant
Le corps qui vit hors de lui qui rit de vie. A dit Rien. Je ne sais rien.
Et la fin du monde, les vides multipliés, le grand Apocalypse qui fait hurler tes bouches
les derniers mots sont begayés