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Mission traduction

Mission traduction 9 - Cédric Demangeot - Maria Borio - Émilie Dickinson

Cédric Demangeot

Traductions anglaises G&J



« ? » 



Poetry has to blend in with reality – so that it is no longer tangible. Poetry must be about reality – from within. 

Poetry must sabotage reality and bring it back to life.


It is not in his verse more or less short or long that we smell the poet or recognize him. It is in the way – necessarily alone – that the page he has soiled sweats the real or not. It is a smell that does not deceive.


Explain a poem: have the carp disgorged. ( Most often, with a fork.)


The word poetry: the most misunderstood of all.


Poetry is not research. She is like blood, connected to herself, good driver of an ignorant life, of its movement, of its efficiency. (Perros)






« ? » 



La poésie doit se mêler du réel – faire en sorte qu'il n'aille plus de soi. La poésie doit concerner le réel – de l'intérieur. La poésie doit saboter le réel et le rendre au vivant.


Ce n'est pas à son vers plus ou moins court ou long qu’on flaire le poète ou qu'on le reconnaît. C'est à la façon – forcément seule – dont la page qu'il a salie sue du vrai ou pas. C'est une odeur qui ne trompe pas.


Expliquer un poème : faire dégorger la carpe. ( Le plus souvent, à coup de fourchette.)


Le mot poésie : le plus mal entendu de tous.


La poésie n'est pas une recherche. Elle est comme le sang, reliée à elle-même, bonne conductrice d'une vie ignorante, de son mouvement, de son efficacité. (Perros)





***



« ! » 



one else, dazzled by default, distracting his comrades by reciting poems of his making, (he was shot on the spot).



On n'en a vu un autre, ébloui par défaut, distraire ses camarades, en récitant des poésies de sa fabrication, (on le fit fusiller sur le champ).



Cédric Demangeot - Une inquiétude - Ed Flammarion





Poèmes de Maria Borio traduits de l’italien par Lorenzo Foltran



I

Il peso si sente come i capelli sulle spalle

i pori che si stringono per non far passare l’acqua


 l’attrito sempre quando capita una coincidenza.


 Ma dicono che oggi il peso del tempo è irreale

assomiglia all’aria spostata dagli insetti


 che si nutrono di sangue e muoiono a volte

sotto il palmo della mano.


 II

La coscienza si stacca, sopra di noi è uno specchio

ci vede punti che galleggiano in una piscina


 vede la pelle sporca del sangue di tanti compresso in una macchia –

i mobili flessi sono dita vegetali, il circuito elettrico sciolto


un pensiero di sottomissione, il pensiero puro di ridarsi al tempo.


 III

Scompariamo nell’acqua. Le nostre case sono acqua

nascondono sul palmo la condensa di molti


 l’idea che osservandola ci trasformiamo

in molti schiacciati in una macchia.


 IV

Poi, per vedersi, la coscienza ha strappato un cavo

lo spezza coi denti, si scheggia le dita con il filo elettrico


 sente la macchia di sangue aperta –

ha immerso il filo nell’acqua…


 V

La coscienza separata dal corpo ha sentito il tempo pulirsi

nella casa come in una vasca una luce di fondale

mobili flessi sono dita vegetali, il circuito elettrico sciolto

una polvere, una prospettiva, un filo incandescente


 il tempo che è coincidenza, la storia di tutti e uno

trasparente fuori dal baricentro nell’acqua


 senza peso, vive e vede



I     

On ressent le poids comme des cheveux sur les épaules

les pores qui se resserrent pour ne pas laisser passer l’eau


 le frottement toujours lorsqu'une coïncidence se produit.


 Mais ils disent qu'aujourd'hui le poids du temps est irréel

il ressemble à l'air siphonné par les insectes


 qui se nourrissent de sang et parfois meurent

sous la paume de la main.


 II

La conscience se détache, au-dessus de nous un miroir nous voit, traces, flotter dans une piscine


 Il voit la peau sale du sang de tant de monde compressé dans une tâche -

les meubles fléchis sont doigts végétaux, le circuit électrique dissous

une pensée de soumission, la pure pensée de se redonner au temps.


 III

Nous disparaissons dans l'eau. Nos maisons sont de l'eau

elles cachent sur la paume le condensat des personnes  


l'idée qu'en l'observant nous nous transformons

écrasés avec les autres dans une tache.


  IV

Puis, pour se voir, la conscience a déchiré un câble

elle le brise avec ses dents, les doigts ébréchés par le fil électrique


 elle ressent la tache de sang ouverte -

elle a trempé le fil dans l'eau...


 V

La conscience séparée du corps a ressenti le temps se nettoyer

dans la maison comme dans une baignoire une lumière de fond

les meubles fléchis sont doigts végétaux, le circuit électrique dissous

une poussière, une perspective, un fil incandescent


 le temps qui est coïncidence, l'histoire de tous et d'une personne

transparent hors du barycentre dans l'eau


 sans poids, il vit et voit





         È quasi pronto, sta per passare

la vita nell’aumento

della proprietà con un distacco, una ricompensa

fedele a sé, solo il giglio viola nel prato

non vale perché dura un giorno.

Potrebbero vederlo dalle finestre di notte,

se volesse potrebbe

consumarlo, raffilarlo la gente

come la punta di una matita.

Questo essere soli è essere di tutti,

il corpo ha odore, la proprietà ha odore,

l’affezione per una donna

che non ha odore, non ha proprietà

rientra nel cliché.

Lo descrivono come si racconta

la vita degli altri o si immagina

inesistente.

La storia dei prodotti

così viva nel minuto

che milioni cercano

la stessa parola, non lo sanno, lo fanno,

lui è il blog, il vlog, il tube

della proprietà isolata di sesso

maschile su cui appoggerebbe la testa

una donna di sesso femminile.

La casa senza io gli altri l’accumulo

degli anni e solo

la felicità del processo, non del fine.


 Potrebbe vederlo la gente

nella stanza a volte con il suo odore

e anche lei

che gli è madre vicino

abitualmente avendo speso insieme

una vita.

Si dorme in due.

Si stava immaginando nelle case

degli altri.




                     C'est presque prêt, elle arrive,

la vie en hausse

de la propriété avec un écart, une récompense

fidèle à elle-même, seulement le lys violet dans le pré

ne vaut pas car il dure une journée.

Ils pourraient le voir des fenêtres la nuit,

s'il voulait il pourrait

se faire consommer, aiguiser par les gens

comme la pointe d'un crayon.

Être seul, être de tous,

le corps a une odeur, la propriété a une odeur,

l'affection pour une femme

qui n'a pas d'odeur, n'a pas de propriété

s’inscrit dans le cliché.

Ils le décrivent comme on raconte

la vie des autres ou on l’imagine

inexistant.

L'histoire des produits

si vivante dans la minute

que des millions recherchent

le même mot, ils ne savent pas, ils le font,

lui il est le blog, le vlog, le tube

de la propriété isolée du sexe

masculin sur lequel une femme de sexe féminin reposerait sa tête.

La maison sans moi les autres le cumul

des années et seulement

le bonheur du processus et non de la fin.

 Parfois, les gens pourraient le voir

dans la chambre avec son odeur

et elle aussi

qui, proche, lui est mère

d’habitude, en ayant passé ensemble

une vie.

On dort à deux.

Il était en train de s’imaginer dans les maisons

des autres.



I                     

Una volta dicevi che ero io

io, che tu eri tu, che camminando

fra un argine e un altro potevamo vedere.


 Il fiume è lo spazio, i pesci bianchi si nascondono.

Una volta passavamo in equilibrio sui sassi

fino a che le nostre mani toccandosi si mordevano.


 Una volta immaginando dalla punta della collina

le differenze vedevamo contorni netti

scomparire nell’erba. Lì e qui


 portano un cosmo e noi fragili, indivisi

con i piedi nell’acqua bruciamo l’io

che può essere tu, il tu che può essere io.


 II

Lo spazio è un vetro,

l’interno e l’esterno.


 Io raccolgo il fiume freddo,

tu lo espandi in ologramma.


 Tu sono io nello schermo, io è tutti.


 IV

Tutto accade

un video ha imparato a riprodurlo.


 Tutto accade

i pesci bianchi nel fango

uscivano, entravano.


 Li inseguivi come cerchi

appaiono, scompaiono.


 V

A volte tu, io

vediamo ovunque

i contorni della violenza.


 Chi eri: nomi in codice. Chi sei:

io, tu, l’altro

a volte è bianco, nudo, perfetto.


 Il pavimento come il fiume si increspa:

entravano e uscivano i pesci

sbiancando.


 VIII

A volte tutto resiste in trasparenza:

esiste, muore?


 Tu attorno a io

lucina improvvisa, contemporanea.



I

Jadis, tu disais que c'était moi

moi je disais que c’était toi que nous pouvions voir 

en marchant entre une berge et l’autre


 La rivière est l'espace, les poissons blancs se cachent.

Jadis, nous étions en équilibre sur les pierres

jusqu'à ce que nos mains se touchent, se mordent.


 Jadis, en imaginant du sommet de la colline

les différences, nous voyions des contours nets

disparaître dans l'herbe. Là et ici


 ils portent un cosmos et nous, fragiles, indivis,

les pieds dans l'eau, brûlons le moi

qui peut être toi, le toi qui peut être moi.


 II

L'espace est un verre,

l'intérieur et l'extérieur.


 Moi je ramasse la rivière froide,

toi tu la développe en hologramme.


 Toi c’est moi dans l’écran, moi c’est tous.


 IV

Tout se passe

une vidéo a appris à le reproduire.


 Tout se passe

les poissons blancs dans la boue

sortaient, entraient.


 Tu les chassais comme des cercles

qui apparaissent, disparaissent.


 V

Parfois toi, moi

nous voyons partout

les contours de la violence.


 Qui tu étais : noms de code. Qui tu es :

moi, toi, l'autre

parfois c’est blanc, nu, parfait.


 Le sol, comme la rivière, se ride :

les poissons entraient et sortaient,

en blanchissant.


 VIII

Parfois tout résiste en transparence :

existe-t-il, meurt-il ?


 Toi autour de moi

petite lumière soudaine et contemporaine.





Émilie Dickinson



668 


La '' Nature'', c'est ce que nous voyons -

La Colline - l'Après-midi -

L' Écureuil - l'Éclipse - le Bourdon -

Non - la Nature, c'est le Paradis -

La Nature, c'est ce que nous entendons -

L' Ortolan - la Mer -

Le Grillon - le Tonnerre -

Non - la Nature, c'est l'Harmonie -

La Nature, c' est ce que nous connaissons,

Mais sans savoir bien l'exprimer

Tellement Notre Sagesse est entravée

Par sa Simplicité.


Emilie Dickinson

Trad G&J


668


"Nature" is what we see—

The Hill—the Afternoon—

Squirrel—Eclipse— the Bumble bee—

Nay—Nature is Heaven—

Nature is what we hear—

The Bobolink—the Sea—

Thunder—the Cricket—

Nay—Nature is Harmony—

Nature is what we know—

Yet have no art to say—

So impotent Our Wisdom is

To her Simplicity.





*


How happy is the little Stone

That rambles in the Road alone,

And doesn’t care about Careers

And Exigencies never fears—

Whose Coat of elemental Brown

A passing Universe put on,

And independent as the Sun

Associates or glows alone,

Fulfilling absolute Decree

In casual simplicity—


Emily Dickinson




*


Comme elle est heureuse la petite pierre    qui se balade seule sur la route

ne se souciant pas des carrières     jamais ne craignant l'exigence

sa robe d'un brun élémentaire     l'univers l'endosse au passage

indépendante comme le soleil      elle s'associe ou brille seule

exécutant l'absolu décret      en indifférente simplicité


Trad. G&J





Andrew Nightingale




A human is an even number



And this ghoulish number that writes 


to self-curb


obscene flaps of skin,


makes light pen strokes that barely touch the page,


gestures of wings disappearing into the white sky,


A sneeze and a tissue to mop this face, afterwards,


the dream continues



Andrew Nightingale




Un humain est un nombre pair



Et ce macabre nombre qui écrit 


à auto-usage


d'obscènes lambeaux de peau,


donne de légers coups de stylo qui touchent à peine la page,


gestes d’ailes disparaissant dans le ciel blanc,


Un éternuement, et un mouchoir pour essuyer ce visage, ensuite 


le rêve continue.



trad G&J