Le dépôt
Poésies néoclassiques
16/07/2023
Les perdants magnifiques
On en croisait si peu, de ces hommes et femmes
Qui d’une cause concevaient un bastion
Et à tous, sans fin, assénaient leur vision
De l’Humanité, du monde et du concept d’âme.
Et peu importait les levées de boucliers,
L’unanimité de tout un aréopage.
Ils se moquaient de ceux qui se baptisaient sages.
Pour eux, la vérité, n’est qu’un mot singulier.
Le courage, en ce temps, n’était pas un mot vain
Mais la cause l’était, n’en déplaise à chacun.
Les rêves entravés se transforment parfois
En lubies folles, en croyances infondées
Qui d’esprits baroques semblent s’être évadées
Sans qu’un être au monde ne comprenne pourquoi.
17/04/2023
Le Cardinal des Ombres
Il n’avait du Génie, que décrivent parfois
Les récits des biographes officiels,
Que ce regard perdu qui tutoyait le ciel,
Seule concession, aux emblèmes des rois.
Derrière ces vitres, la persistante brume
Cachait de l’horizon l’alignement de rouille
De béton et d’acier, cette immense dépouille
D’un passé prospère que le présent inhume.
De l’apocalypse, cette belle promesse
Ne restait qu’une masse à la forme imprécise,
Qu’un futur vaporeux où nul n’avait de prise,
Qu’une source tarie, aux anciennes richesses.
Et lui, le Cardinal, avait trouvé refuge
Dans cette tour close à la lumière du monde.
Fuyant, telle une ombre, les pensées vagabondes.
Devenu majesté d'un peuple lucifuge.
Luttant contre le temps, son plus vieil adversaire.
Prince d’une nuée de sujets scribouillards.
Lui qui rêvait, enfant, des gloires des Césars
Parvenu au sommet, gardait un goût amer
De cette trahison aux idéaux passés.
Dans sa soif de pouvoir, il avait abdiqué
Son temps, sa liberté, toutes ses amitiés
Et s’était éloigné de la réalité.
Alors capitaine d’un navire égaré
Sur l’impassible mer de l’inertie des masses,
Il était fatigué de contempler l’impasse
Érigée par la foule année après année.
17/04/2023
L’insidieuse victoire
Des siècles précédents, infatigablement,
Les maîtres de ce monde imitaient les erreurs;
Nul pion n'admettait sa défaite au vainqueur
De cette partie d'échecs aux mats incessants.
Chaque cour concourait d’apparat et d'audace,
Qui par jeu, qui par peur d'être discréditée
De quitter la partie, sans honneur ni fierté,
Sur un mat du lion et en perdant la face.
Un simple affaissement et c'était la curée,
De chaque nation, se levaient des armées,
Si innombrables qu'elles dépeuplaient le monde.
Ces egos insensés, luttant pour le pouvoir,
Chaque jour, convoitaient, la promise victoire,
Qui se moquait des rois, indomptée vagabonde.
17/04/2023
Le damier éphémère
Un immense damier, au-delà de la vue,
Agencement parfait de lignes, de sillons,
Occupait chaque place, nouveaux bastions
Des paysans d'alors, aux formes biscornues.
Cet immense damier, assemblage éphémère,
Mosaïque changeante, année après année,
Où des ors succédaient aux nuances pourprées,
Avait la beauté des actes involontaires.
Titanesque tableau d'un peintre méthodique,
Aux rêves infinis, aux songes fantastiques,
Voyant en l'horizon une toile nouvelle,
Ce damier éphémère emplissait l'étendue
D'un millier de toises, jusqu'à perte de vue.
Espoir de récoltes de la toile irréelle.