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E-poésies

E-poésie 4 - Pierre Andreani - Alexandre Poncin - Pierre Goujon - David Rolland

quand on y pense c’est fou

le monde a changé, tout est devenu 

lointain, on prend froid à se frot-

ter aux autres, à n’importe qui



ça pleure de haut

en bas de droite à gauche 

un cauchemar japonais 

une assimilation à l’envers



je suis triste moi surtout

dès que j’allume ma cigarette 

mélancolique ça s’apprend 

le désespoir la dignité aussi 


en reprenant tout à zéro sur 

une île déserte entouré de

verdure un jardin de sou- 

venirs à trier, à compulser



c’est dur, on y pige que dalle 

c’est broussailleux c’est mé- 

langé heureusement que tu 

rentres bientôt je ne vais plus 

mentir c’est promis, je ne 

peux plus rien dire de faux 

c’est insupportable cet 

aller-retour permanent entre 

l’avant et l’arrière des choses



tu reposes sur la panse maritale 

c’est l’heure du jour de nous unir 

dans la foudre universellement 

crainte et qui surprend l’aumônier



tout carré tout blême j’ai attendu 

dix heures du soir

pour verser une larmichette 

d’égoïste quand le réverbère

a éclaté dans la rue 

avec personne dessous



ainsi tout blême je radote

tout est devenu imagerie

image de soi désespoir

j’en ai les yeux rouges d’angoisse 

la ruine des peuples


& sa suite d’événements catastrophiques


Pierre Andreani

extrait de 'Drames à venir'




*



toute vie définitive 


comme une présence



je ramasse humblement ma poussière


demain dira bien


présence du poème

la traque

du lit ardent de l’union



la mémoire

est une pièce

vide,

le souvenir

habite les combles


je l’entends parfois 


gratter


le matin 

au réveil



Alexandre Poncin

Extrait de 'Paroles mendiantes'




Promenade en hiver


  Il lui dit que le moment était venu de se séparer.  Elle versa quelques larmes puis s’en fut préparer sa valise.  Il la raccompagna jusqu’au pied de l’escalier, et ils se dirent adieu.  Lorsqu’elle fut partie, il déchira un morceau de drap, et, se penchant à la fenêtre, il l’agita mélancoliquement au passage de l’avion de Dublin.  Le pilote lui adressa un sourire aimable, et les passagers répondirent à son salut en faisant quelques signes de la main.  Il referma la fenêtre, non sans avoir pris soin de laisser à l’extérieur quelques miettes de pain pour les oiseaux.  Puis il quitta l’appartement et gravit la colline.  Lorsqu’il eut traversé les nuages, le ciel apparut, d’un bleu de plus en plus intense.  Le soleil émergea de la brume.

 Il se trouvait à mille mètres d’altitude, exactement.  Il s’arrêta, cueillit un œillet sauvage et le porta à ses lèvres.  Une pie s’envola.  Il l’observa avec tristesse.  Il redescendit alors vers la ville.  Sur les bords du canal une jeune fille faisait le portrait d’un iguane.  Il s’approcha, mais l’animal, effrayé, s’enfuit.  La jeune fille lui reprocha amèrement son inconséquence.  « Qu’est-ce que vous avez fait, dit-elle, vous êtes tout pâle ».  Elle lui tendit un miroir.  Il se contempla : il était livide.  Il rendit son miroir à la jeune fille, qui, par mégarde, le laissa choir.  Les morceaux s’éparpillèrent sur le sol en formant une fleur de nature inconnue.  La jeune fille se pencha et dit « vous êtes de plus en plus pâle ».  Il s’éloigna, sans rien dire.  A quelques kilomètres de là, il s’arrêta et pénétra dans un café encore ouvert, malgré l’heure tardive.  « Un verre de vin rouge », commanda-t-il.  Mais le serveur ne le vit pas.  Il était transparent.  Lorsqu’il comprit qu’il ne serait jamais servi, il quitta le café en s’en fut errer dans la ville.  Il était alors devenu totalement invisible, et seules les feuilles mortes qu’il dérangeait en marchant trahissaient sa présence.  La jeune fille passa près de lui et dit, en regardant le sol :  -       Tiens, voici l’hiver : les feuilles mortes s’envolent.


Pierre Goujon



David Rolland


Aucune brutalité No brutalitad




Aucune forme de brutalité

C'est la Parole, sa consigne, un ordre

Les relations, ne pas rompre hors respect


Aucune forme de brutal désordre

Les êtres vivants, jamais de violence,

Physique psychologique verbale


Aucune forme d'inintelligence

L'erreur, non cultivé et non brutale,

Reste appréciée à sa juste valeur

No brutalitad, chaque chance à l’heure


David Rolland

source Youtube

https://youtu.be/B-wmhldY9h8?si=m2gU9Q2iiVv-4H1h