Le dépôt
LE FLEUVE SOURD [poème]
théâtre d'ombres
de
la
carnation libellule
chiens masqués
trognes
gueules huîtreuses
calvaires
dents plombés de l'antédiluvien
une
masse d'écailles
dentelure hérissée
cornue
ta gueule d'anaconda
conte fleurette à mes os
surgissement
de
bouches vieillies
la
demeure profanée
et ses fleurs de rêve
sur
ces
terres lémuriennes
c'est encore cela
un chant de peur et d'amour
des ciels crachotant
leurs
paupières
musaraignes baignée de sang
chemins lourds et craquelés
ventres mutants
sous
l'éclat porcin lunaire
écrase la maigreur humaine
nous préférons l'alcool d'insecte
à cette
lune basique
passons outre
cette langueur des orages
disent les voyageurs
corps de singes
sous les draps
poils
liqueurs cliniques
des ventres inféconds
bouches dorées de fourmis
ton spasme
cet engorgement
ce nœud de sang vipérin
entrailles et lame
et corps pour le ciel
quand viendra à nous
la nuit
et ses collectes
les ajoncs
les museaux meurtris
moustaches dents cassées
os s'entassant
l'hymne de la boue
ma consumée
je te présente
le
crâne où l'âme calcine
lente dérive des feux
les rites
dentelles puissantes du sang
fumée grisâtre en dedans
l'épouvantail se retire
bouteilles vides
aiguilles la peau les bois durs
l'enlisement
dans ce marais ses fenêtres
cœur gris
sous l'ombrelle
une spirale
la plus lente
mouvement
d'un ciel sans nuit
psychotique fuite vers les forêts
pieds nus
marcher
quand l'ombre s'amasse
s'engorge
m'inonde
corps impavide
du lac noir
les nuits où nous passons
cette trame cendreuse
à notre suite
nos dents ces champignons
vaincu
je nage dans ton rêve
enfant des lagunes
et des kiosques morts
ces harmoniums brinquebalants
mouche osseuse
chair pour le mariage
quelques voiles
une musique inaudible
l'oreille ne comprend pas
ce qui s'amenuise
la vie sableuse
le ver jouant sa crucifixion
pour les vains grumeaux
que nous sommes
ombre animale
sous les feuilles
à l'orée de la mer
silence rongeant
nos bouches ravaudées
cousues de nuit de rimes de pestes
ces maigres chiens
le fleuve oscillant
cils herbeux féminins
plaines pareilles à des tumeurs
il gravite lourd ombreux
insensible c'est peu dire
en son sein le corps froid plombé
d'un minuscule oiseau
perdu lui aussi
dans ces méandres sans mémoire